M. Fatseas et S. Berthoz lauréates de l’AAP « Conduites Addictives et Drogues » de l’IRESP

Melina Fatseas et Sylvie Berthoz

Melina Fatseas et Sylvie Berthoz, de l’INCIA, sont lauréates de l’appel à projets de recherche « Conduites Addictives et Drogues (CAD) : Prévention, Mécanismes, Repérage et Accompagnement » de l’Institut pour la Recherche en Santé Publique (IRESP) et l’Institut National du Cancer (INCa).

Melina Fatseas est PUPH, cheffe du pôle d’addictologie du CHU de Bordeaux et du CH Charles Perrens, et coordonnatrice du centre de recours et de coordination (CRC) des troubles des conduites alimentaires Nouvelle-Aquitaine-Sud (CRC TCA Sud-NA). Elle est chercheuse associée dans l’équipe EcoPsy.

Sylvie Berthoz est chargée de recherche Inserm et co-responsable de l’équipe EcoPsy.

Le projet ayant remporté cet appel est : Implémentation d’une intervention multicomposante visant à réduire les comportements alimentaires de type addictifs : une étude pilote randomisée.

Description du projet

Les désordres de la prise alimentaire regroupent des entités syndromiques telles que l’anorexie mentale (sous-types restrictif et boulimique/purgatif : AM-R et AM-BP), la boulimie nerveuse (BN), l’hyperphagie boulimique (HB) pour les plus courantes, mais aussi les troubles du comportement alimentaire non spécifiés (TCANS) tels que l’addiction à l’alimentation. Compte tenu des conséquences majeures de ces troubles et des limites actuelles des prises en charge, le développement de nouvelles approches thérapeutiques constitue un enjeu majeur de santé publique.

Dans cette perspective, la communauté internationale s’accorde sur l’intérêt d’une approche transdiagnostique basée sur des regroupements phénotypiques ciblant des déterminants communs et ouvrant ainsi la voie à de nouvelles approches thérapeutiques.

Dans ce contexte, l’alimentation compulsive, également désignée sous le terme accès hyperphagiques, a été identifiée comme un phénotype addictif se manifestant par la perte de contrôle de la prise alimentaire et la surconsommation d’aliments hyperpalatables (HP) à haute valeur calorique partageant les mêmes caractéristiques que les substances addictives. Bien qu’il n’existe pas de consensus sur la définition de comportements alimentaires de type addictifs, le craving à l’alimentation, la dysrégulation émotionnelle et certains déficits cognitifs sont de plus en plus discutés comme mécanismes sous-jacents communs de ces troubles.

Les recommandations actuelles soulignent la nécessité de traduire ces découvertes en prise en charge plus spécifiques et ciblées. Dans ce contexte, notre équipe a développé une intervention psychothérapique multicomposante comprenant la Thérapie Cognitivo-Comportementale, la Thérapie d’Entraînement aux Compétences Emotionnelles et la Thérapie par Remédiation Cognitive afin de cibler ces déterminants.

Nous proposons d’examiner dans une étude pilote interventionnelle la faisabilité et l’acceptabilité de cette intervention de groupe multicomposante chez des patients en demande de prise en charge pour un trouble alimentaire de type addictif, et d’établir des données préliminaires d’efficacité sur la réduction des épisodes hyperphagiques et du craving à l’alimentation au suivi à 3 mois, en combinant des évaluations cliniques standard à une approche en vie quotidienne selon la procédure EMA (Ecological Momentary Assessment method). Les résultats de cette étude pilote devrait souligner l’intérêt d’une approche transdiagnostique ciblant les mécanismes addictifs des troubles alimentaires, et permettre ainsi d’implémenter des programmes plus intégratifs et individualisés dans les prises en charge standard. Enfin, avec la méthode EMA, notre projet permettra de mieux comprendre les déterminants de la perte de contrôle de la prise alimentaire et, d’évaluer dans une future étude l’impact en vie quotidienne de l’intervention multicomposante sur ces paramètres.